La "mise au placard" n'est pas un terme que l'on trouve souvent dans les manuels de gestion d'entreprise. Pourtant, ce phénomène, aussi connu sous le nom de placardisation, touche de nombreux salariés à travers le monde. Que signifie réellement être mis au placard, et pourquoi est-ce une préoccupation croissante dans le monde du travail ?
Imaginez un employé dévoué, un collaborateur engagé qui a toujours pris ses responsabilités au sérieux. Soudain, ses tâches se réduisent, ses projets sont retirés, et il se sent victime d'une dégradation inexplicable de ses conditions de travail. C'est la douloureuse réalité de la mise au placard, une forme insidieuse de harcèlement moral qui peut mener à la démission ou même avoir des conséquences plus graves sur la santé mentale.
D'après une étude de l'institut Montaigne, relayée par France Inter, ce sont près de 200 000 salariés qui sont mis au placard chaque année en France. Ce chiffre alarmant révèle une facette souvent cachée de l'entreprise, où les relations entre l'employeur et le personnel peuvent parfois devenir toxiques.
Dans cet article, nous explorerons en profondeur les signes, les raisons et les conséquences de la mise au placard. Nous aborderons également les moyens légaux de réagir, et comment, en tant que victime ou employeur, vous pouvez comprendre et naviguer dans ce cadre légal complexe. Que vous soyez un manager, un employé, ou simplement curieux de mieux comprendre ce phénomène, cet article a pour objectif de vous éclairer sur un sujet qui mérite une attention plus que sérieuse.
Les signes d'une mise au placard
La mise au placard, ou placardisation, est un terme qui sonne étrangement familier à beaucoup, mais reste mystérieux dans sa définition précise. Il s'agit d'un sujet complexe et sensible, souvent associé au harcèlement moral, mais quels sont les signes exacts ? Comment savoir si vous, ou quelqu'un que vous connaissez, êtes victime de cette pratique ?
Définition et synonymes
La mise au placard est une forme de dégradation délibérée des conditions de travail. Elle peut prendre de nombreuses formes, dont la réduction des responsabilités, l'isolation professionnelle, ou même la diminution des opportunités de croissance. Parfois, elle est perçue comme un moyen pour pousser un employé à la démission. Les synonymes incluent des termes comme "harcèlement moral" et "exclusion professionnelle", qui résonnent avec une réelle douleur et une confusion pour les victimes.
Symptômes et indicateurs
- Conditions de travail : modifications soudaines et inexplicables des tâches, dégradation des responsabilités.
- Relations avec les collègues et supérieurs : isolation, manque de communication, exclusion des réunions importantes.
- Santé mentale et émotionnelle : stress accru, sentiment d'inutilité, dépression possible.
Témoignages de victimes
L'impact de la mise au placard va bien au-delà des simples mots. Voici quelques exemples réels et émotionnels :- Sophie, une manager expérimentée, a vu ses projets retirés un par un sans explication, la laissant sans responsabilités.
- Marc, un employé dévoué, s'est retrouvé isolé de son équipe, sans tâches significatives, et a finalement été poussé à la démission.
Ces histoires mettent en lumière la réalité troublante et souvent cachée de la placardisation. Marginaliser un collaborateur n'est pas une solution acceptable, quelles que soient les "raisons" invoquées : il faut immédiatemment réagir face à cette situation.
Réagir face aux signes : que faire dans l'immédiat ?
Si vous reconnaissez ces signes, il est crucial de réagir rapidement et de manière réfléchie pour ne pas aggraver la situation dans certains cas. Voici quelques démarches à suivre dans un premier temps :- Accepter la situation : cette première étape est la plus importante, c'est certainement la plus dure aussi. Il est difficile d'accepter une telle situation mais la prise de conscience est nécessaire pour en sortir.
- Communication ouverte : dans un premier temps, ne cherchez pas de rapport conflictuel, tentez la médiation. Parlez-en à des collègues ou à un manager de confiance. Entourez-vous, ne vous isolez pas. Tentez de trouver des relais au sein de l'entreprise (syndicats/représentants du personnel).
- Documenter les faits : avant d'entamer toute démarche "officielle", assurez-vous d'être au clair dans votre tête sur la situation que vous vivez. Pour cela, nous vous conseillons de tout noter, et d'analyser vos écrits à "tête reposée" pour une meilleure prise de recul. Gardez les preuves associées dans un espace personnel : ni sur votre ordinateur professionnel, ni dans votre boite mail du travail (à laquelle vous pourriez ne plus avoir accès, du jour au lendemain).
- Prenez soin de vous : l'arrêt maladie peut être la solution lorsque le mal-être persiste. La mise au placard est une forme de torture ayant pour objectif de vous poussez à partir sans dépenser un centime : vous n'êtes pas responsable de cette situation. Il n'y a aucun honte à se mettre en arrêt maladie quand on est persécuté, sali voire piétiné.
La mise au placard n'est pas un phénomène à prendre à la légère. En comprenant ces signes et en sachant comment y réagir de façon immédiate, vous pouvez prendre les mesures nécessaires pour protéger vos droits et votre bien-être au travail.
Les raisons de la mise au placard et les impacts potentiels
Mais pourquoi certains salariés sont-ils mis au placard ? Quels facteurs peuvent conduire un employeur, un chef, ou même un collègue à adopter cette conduite ? Comment avez-vous pu vous retrouver dans cette situation ? On vous rassure tout de suite si vous subissez une telle situation : vous n'en êtes pas responsable ! Plongeons dans les motivations, les attitudes, et les dynamiques qui peuvent mener à cette situation préoccupante.
De la part de l'employeur
- Stratégie malavisée : certains responsables, dans une tentative de gérer une situation difficile, peuvent utiliser la mise au placard comme une solution temporaire, souvent sans comprendre les implications morales et légales.
- Éviter la rupture conventionnelle : parfois (souvent?), la mise au placard est une tentative de pousser un employé à la démission, évitant ainsi une séparation à l'amiable qui pourrait être plus coûteuse (notamment si elle prend en compte les préjudices subis).
- Conflits personnels : les désaccords ou les différences de valeurs peuvent conduire à la dégradation des conditions de travail pour un salarié spécifique.
Du côté du salarié
- Profil visé : la mise au placard peut viser un certain profil de travailleur, que ce soit en raison de l'âge, du genre, des compétences, ou même des opinions politiques.
- Répercussions sur la carrière : la mise au placard peut affecter les opportunités de croissance, la satisfaction au travail, et même la santé mentale du salarié. Les jalousies et/ou compétitions internes peuvent mener à des comportements dévastateurs.
La mise au placard est un problème complexe et multifacette qui nécessite une compréhension nuancée. Que vous soyez employeur, manager, ou salarié, connaître ces raisons peut vous aider à identifier et prévenir ce phénomène, et à agir de manière responsable et éthique.
Comment sortir d'une mise au placard ?
Se retrouver mis au placard dans son entreprise est un défi majeur, mais il existe un chemin clair et méthodique pour s'en sortir. Voici un guide pas à pas pour réagir efficacement et reprendre le contrôle de sa situation professionnelle.
Étape 1 : documenter les faits
- Collecter des preuves : notez tous les changements, incidents, et communications qui indiquent une mise au placard.
- Créer un dossier de documentation des faits : organisez toutes les preuves et informations dans un dossier, que ce soit en prévision d'une éventuelle action légale ou par simple protection personnelle (contre un licenciement abusif, par exemple).
Étape 2 : dénoncer la situation à l'oral
- Parler avec un manager ou la direction : abordez la situation avec votre responsable, manager, ou même la direction, et exprimez vos préoccupations.
- Discuter avec les Ressources Humaines : si nécessaire, impliquez le service des ressources humaines pour plus de soutien.
À l'issue de cette seconde étape, l'entreprise doit prendre ses responsabilités. C'est une obligation légale de protéger un salarié en souffrance au travail. Il arrive que les ressources humaines ou la direction elle-même mette fin à ces agissements, soit en séparant les salariés impliqués, soit en se séparant du salarié harceleur.
Malheureusement, il arrive aussi que l'entreprise soit complice voire à l'origine de ce type de comportements, dans ces conditions, nous vous conseillons : (i) de passer à l'étape 3 pour officialiser la situation (conserver des écrits dans le cas où la situation venait à déraper) et de (ii) commencer à chercher une nouvelle opportunité professionnelle pour rejoindre un environnement de travail sain.
Étape 3 : dénoncer par écrit
- Écrire une synthèse formelle : si la situation ne s'améliore pas, rédigez une déclaration écrite en utilisant la documentation des preuves que vous avez recueillies. Structurez votre approche et restez factuel(le) dans vos propos.
- Envoyer la synthèse aux parties concernées : fournissez cette synthèse à votre employeur, aux ressources humaines, ou à d'autres parties concernées. Vous pouvez le faire par mail (avec un accusé de lecture si possible) et/ou par courrier (lettre recommandée avec accusé de réception).
Étape 4 : s'entourer d'un avocat si nécessaire
- Évaluer la situation : si vous sentez que l'entreprise joue un jeu dangereux ou que la situation risque de vous échapper à tout moment compte tenu de l'environnement malsain dans lequel vous évoluez, consultez un avocat spécialisé pour renforcer votre stratégie de défense (sans le mentionner à votre employeur, au moins dans un premier temps).
- Engager des démarches légales : si nécessaire, engagez une action en justice avec l'aide de votre avocat. Ce n'est pas une question d'égo, ni de fierté, mais de dignité.
Étape 5 : explorer des solutions pour soi
- Considérer la rupture conventionnelle, pas la démission : vous n'êtes pas responsable de cette situation, vous n'avez pas à partir sans rien et en prenant tous les risques. Si vous souhaitez quitter l'entreprise, assurez votre avenir professionnel en cherchant une porte de sortie et négociez un départ tarifé (si vous avez souffert de cette situation, l'entreprise doit en assumer les conséquences).
- Chercher du soutien psychologique et professionnel : considérez un soutien thérapeutique et professionnel pour gérer l'impact émotionnel de la situation. Ne restez jamais seul(e) : parlez, encore, toujours. Et si votre entourage ne vous écoute plus (ou semble démunie), la meilleure solution est de se tourner vers des professionnels expérimentés.
La mise au placard est une épreuve délicate qui demande une réaction réfléchie et méthodique. En suivant ce guide pas à pas, vous pouvez prendre des mesures constructives pour vous protéger, défendre vos droits, et finalement vous sortir de cette situation difficile. La clé est la documentation, la communication, et, si nécessaire, le soutien juridique.
Conclusion : ne restez pas seul(e) au fond du placard dans lequel on vous a enfermé !
La mise au placard au travail est un phénomène insidieux qui peut avoir des répercussions graves sur la vie professionnelle et personnelle des victimes.
La vigilance et l'action sont essentielles. Si vous ou quelqu'un que vous connaissez êtes confronté à cette situation, n'hésitez pas à consulter un professionnel ou à chercher de l'assistance légale. Votre bien-être et votre carrière méritent le respect et la dignité.
